En passant par l'Ouzbékistan, avec mes sumos
Jadidisme, pollinisation, estampes et poésie
Bonjour,
permettez-moi de vous souhaiter une excellente semaine en compagnie, aujourd’hui, d’un musée, de jardins, de sumos et de vers.
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Bonne lecture !
Musée de roi
Bon eh bien voilà, cette fois on y est. Malgré tous nos efforts, malgré l’intransigeance de m’sieur Retailleau et de France Info… une Libanaise habite à Paris. Oui, Paris France, genre c’est le pays des droits de l’homme.
Mais inutile d’écrire à la préfecture : elle va sans doute bientôt nous quitter. Car Lina Ghotmeh est très occupée. Née en 1980 à Beyrouth, cette femme qui se revendique “architecte humaniste” (Brrr ça fait peur !), tout juste nommée l’une des “100 étoiles montantes les plus influentes de 2025” par Time Magazine, ne sait plus où donner de la tête. Alors que l’Angleterre la choisissait pour refaire l’aile Ouest du British Museum, la voici qui doit s’envoler pour l’Ouzbékistan.
Le pays d’Asie centrale lui a confié la création de son musée du jadidisme, dont l’ouverture est prévue en 2027 à Boukhara. Boukhara ? Une ville de 300 000 âmes située, nous éclaire Wikipédia, “sur le cours inférieur de la rivière Zarafshan, au milieu d’une oasis, à la limite orientale du désert du Kyzylkoum“. On voit tout de suite mieux.
On ne connaît pas et pourtant… Son histoire est d’une richesse infinie. Située à moins de 300 kilomètres de Samarcande (et donc étape essentielle des routes de la soie), l’oasis de Boukhara a été désirée et conquise par Darius 1er, par Alexandre le Grand, par les Omeyades arabes, par les Samanides persans. Avicenne et Gengis Khan s’y sont promenés. Elle déclina ensuite lentement jusqu’au coup de grâce : son intégration comme protectorat à l’empire russe, puis sa conquête par l’Armée Rouge dans les années 1920, suivie d’une lente asphyxie sous la poigne stalinienne.
Entre-temps, il y a donc eu le jadidisme, auquel souhaite désormais rendre hommage la république ouzbèke. Ce mouvement islamique du XIXème siècle, tourné vers l’éducation, la culture et l’égalité des sexes trouve un nouvel élan aujourd’hui, en partie authentique et en partie poussé par les autorités locales pour lutter contre l’emprise intégriste.
“Cette commande a été ma première rencontre avec le mouvement jadidiste”, s’émeut Lina Ghotmeh dans une interview à Arch Daily. “Son esprit réformateur, l’accent qu’il met sur le rôle des femmes dans l’éducation, comme son ouverture aux échanges internationaux, sont remarquables. Il n’a pas qu’une dimension historique. Il résonne aujourd’hui, surtout pour les jeunes gens. C’est une façon de lier le savoir, l’éducation et la religion dans un creuset de progrès et d’ouverture”.

Pour rendre honneur à cette tradition spirituelle, ce n’est pas n’importe quel lieu qu’a choisi la Fondation du développement artistique et culturel de l’Ouzbékistan (laquelle a aussi lancé cette année une nouvelle biennale artistique, toujours à Boukhara et qui s’appelle… attendez, je l’ai noté par ici, ah, voilà… la “Biennale de Boukhara”). Le futur musée exposera ses richesses derrière les portes de l’ancienne demeure de Fayzulla Xo’jayev, l’une des figures centrales du mouvement que je qualifierais bien volontiers de sentier lumineux, si le terme n’était pas déjà pris. Ce fils de marchand a une biographie assez passionnante, comme on le comprend en lisant sa vie narrée par The Diplomat :
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