Du Rwanda à l'Antarctique, en passant par des tanks et des séries
Ici les chaleurs reviennent, ailleurs on a bien froid.
Chère lectrice, cher lecteur,
permettez-moi de vous souhaiter un très bon week-end en compagnie, cette semaine, d’irrigation solaire, d’une vie à la fraîche, d’une fille et son tank, de manifs, d’une belle bête et de séries à la con.
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Météo
Rwanda : ciel dégagé, pluie solaire
Allez, tiens, une question : combien de personne sur Terre, en ce moment (enfin, en 2023, date des derniers chiffres disponibles), n'ont pas accès à l'électricité ?
Non, plus.
Non, moins, quand même.
750 millions, selon l'Agence Internationale de l'Énergie. Et 650 millions vivent en Afrique subsaharienne. Je dois cette découverte à MongaBay, qui la cite au fil d'un long reportage signé, depuis le Rwanda, Aimable Twahirwa. Ce journaliste scientifique de Kigali a tenu cette semaine à attirer notre attention sur les exploitations agricoles de très petite taille (une famille voire une personne) et sur l'importance qu'a l'électricité pour leur prospérité, voire leur existence.
Car sans électricité, pas d'eau. À part celle qui tombe du ciel, quand elle veut (c'est-à-dire pas très souvent, en Afrique subsaharienne). La Banque Mondiale estime que 95 % des terres cultivées de la région ne sont arrosées que d'eau de pluie. C'est le plus faible taux d'irrigation au monde. Il y aurait bien aussi, en théorie, les sources… mais celles-ci s'avèrent trop souvent polluées. Il faut aller chercher plus profondément sous terre. Cela n'a rien de simple, comme l'expliquait en 2018 une étude publiée par Science Direct, consacrée plus spécifiquement au Rwanda :
Exploiter ce potentiel revient très cher. Non seulement l'investissement initial, pour acheter les générateurs et les pompes, est élevé mais, en plus, l'inflation permanente de l'essence rend la maintenance et les opérations toujours plus coûteuses. Ces coûts sont incroyablement élevés pour les exploitants indépendants, dont les terrains sont souvent éloignés et petits.
Comment diminuer ces coûts ? Les énergies renouvelables (et ici, le solaire) s'imposent. Tel est le constat du World Resources Institute. Toujours cité par l'article très complet de MongaBay, ce centre de recherche international relevait l'an dernier que l'accès à l'électricité s'améliorait sans cesse en Afrique subsaharienne (de 33 % de la population en 2010 à 49,9 % en 2022), mais que ce n'était pas le cas de sa consommation —soit en moyenne 124 kW/h par an, l'équivalent de trois ampoules par foyer. "Ces statistiques révèlent un véritable dilemme de développement : il ne sert à rien d'avoir accès à l'électricité, si les clients ne peuvent pas se la payer."
De là est né le concept de PURE, pour "Productive Use of Renewable Energy".
L'Usage Productif d'Énergie Renouvelable consiste à investir dans l'accès à l'énergie pour les endroits qui contribuent à générer des revenus dans les communautés rurales, tout en tirant la demande d'électricité verte. Quand il est bien appliqué, le PURE est un cercle vertueux, qui non seulement booste l'usage électrique, mais en prime soutient une croissance économique à bas carbone, crée de l'emploi pour la population jeune et améliore les revenus des communautés rurales.
Imaginons par exemple qu'un gouvernement ou une organisation de développement investisse dans l'irrigation par énergie solaire, ainsi que dans l'équipement qui apporte de la valeur aux processus agricoles, comme des moulins à grains. Ces technologies améliorent la productivité, la sécurité alimentaire, l'emploi et les revenus. Ils accroissent également la demande locale en électricité. Parce que de meilleurs revenus aident les communautés à payer leur facture énergétique, les promoteurs sont incités à étendre la grille énergétique ou, mieux encore, à déployer des systèmes autonomes écologiques, comme des mini-grilles alimentées à l'énergie solaire, afin de répondre à la hausse de la demande. La qualité de vie devient meilleure, pour toute la communauté.
Tout commence donc par l'irrigation. Elle peut être prise en charge par le solaire. Ensuite, plus on investit, plus on peut aider. La réfrigération, la transformation, le stockage, le transport des produits : toute la chaîne de valeur a besoin d'énergie, propre si possible, et de préférence au cours le moins fluctuant possible.
MongaBay est allé voir de plus près à quoi ressemble l'irrigation solaire, au Rwanda en l'occurrence. Il nous raconte par exemple l'histoire de Victor Ndwaniye, un fermier du district de Kirehe où les sécheresses sont fréquentes. Jusque là, durant les saisons sèches, il lui fallait arroser ses fruits et légumes deux fois par jour, en allant puiser, avec un seau, dans un lac environnant. De nouvelles pompes souterraines alimentées à l'énergie solaire améliorent maintenant ses rendements, tout en lui cassant un peu moins le dos… et je suppose le moral. Après deux saisons aidé de ce système, ils récolte 3 tonnes de légumes par hectare, contre une seule auparavant. Et il peut régler plus finement l'apport en eau, pour en utiliser moins. Le Bureau Rwandais de l'Agriculture et des Ressources Animales estime que 229 coopératives et 1 136 paysans utilisent désormais l'irrigation solaire.
Le Rwanda n'a pas été choisi par hasard. Le pays a pleinement intégré le principe au sein de la filière agricole : il projette de faire passer son utilisation de 646 à 1 146 hectares des terres cultivées en cinq ans, selon sa National Strategy for Transformation 2024-2029, un plan quinquennal de développement.
Un document dont l'une des qualités, et pas la moindre, est qu'il nous suffira à mon avis de le recopier et le suivre mot à mot quand on pourra s'occuper de redresser le pays, une fois sortis des quinquennats Morandini.
(Il est là, téléchargez-le pendant qu'il est encore temps) :
Voyages
Le safari de la semaine
Au début, l'équipe de recherche de Patricia Esquete, docteure à l'université d'Aveiro au Portugal, a cru qu'elle n'avait pas de chance. Un surplus de glace leur barrait l'accès à la mer de Bellingshausen, les confinant au Passage de Ronne, à l'entrée du continent antarctique. L'expédition allait-elle tomber à l'eau ?
La réponse est oui, mais plus ou moins. Il y a toujours quelque chose à faire en Antarctique, même quand on est coincé (à condition d'être scientifique, hein, ne le prenez pas pour une recommandation pour les vacances). Pour s'occuper, on peut par exemple passer un peu de temps sur les images satellites et, si on a de la chance, remarquer soudain que, à 30 kilomètres de là, un iceberg de 510 kilomètres carrés (soit la taille de Chicago, nous dit Eos), est en train de se détacher. Capitaine, larguez les amarres ! Barre à tribord et bastaque à l'armure !
Une telle rupture de la banquise promettait une découverte exceptionnelle : la possibilité d'observer en temps réel ce qui vit sous la glace, loin du soleil, loin des yeux, loin du cœur. Voir l'invisible, la vie là-dessous, avant toute contamination, même par la lumière, laquelle allait tomber sur ce bout d'eau pour la première fois, depuis des siècles estiment les chercheurs. "Il y a déjà eu des expéditions capables de se mobiliser rapidement face à l'exposition nouvelle d'un fonds marin", explique Eos. Mais là, ce n'est pas pareil :
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