L'Édition du week-end #52
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Chères amies, chers amis,
déjà la 52° Édition du Week-end ! Je n'en crois pas mes yeux. Un an de production et d'infos différentes qui ont trouvé à vous plaire et vous intéresser.
Alors, pour célébrer la fin d'année et ce dernier numéro de 2023, je cède à mon tour à la tradition du Top annuel.
Rassurez-vous : je ne vais pas recenser les tops et flops des news de l'année… J'ai un peu trop d'empathie pour cela !
J'ai plutôt choisi de vous présenter et recommander mes podcasts préférés. Ceux qui m'ont accompagné tout au long de l'année, et ont aussi, à leur manière, contribué à nourrir cette newsletter. Et qui pourraient, je crois, vous intéresser.
Parce que mes émissions préférées sont à l'image de ce projet : un mélange d'information et de divertissement, d'art et d'actualité. Parce que j'y retrouve l'intelligence et la finesse des articles que je traque et relaie au fil des semaines. Parce qu'elles aident à creuser et comprendre, mais aussi parfois à oublier le monde qui nous entoure.
Ce top 9 (plutôt qu'un top 10 parce que, bon sang, changeons un peu) contient quelques titres anglophones. J'ai longuement hésité mais ai choisi de les relayer malgré tout. Je crois en effet important d'en parler. Ne serait-ce que pour savoir qu'ils existent, ce qui s'y dit, qui les fait : ce sont des informations à part entière. Aussi parce que, malgré tout, ils restent compréhensibles : on y parle clairement, sans vocabulaire extraordinairement recherché, sans accent complexe. Et que les masquer m'aurait paru, tout simplement, injuste et incomplet.
Je vous souhaite donc d'heureuses fêtes de fin d'année… Mais surtout une bonne écoute : ce n'est pas la matière qui devrait vous manquer !
9 : Le Collimateur

J'ai déjà évoqué Le Collimateur au détour d'une revue de presse, je crois, mais il me paraît nécessaire d'y revenir : c'est certainement l'émission, plus que toute autre, dont je ne rate jamais un seul épisode (ce n'est d'ailleurs que parce que j'en ai déjà parlé qu'elle atteint ainsi la dernière position).
Longtemps co-produit par l'IRSEM, l'Institut de Recherche Stratégique de l'École Militaire, Le Collimateur a en septembre dernier pris son indépendance. Il est animé par Alexandre Jubelin, historien et auteur de Par le fer et par le feu : Combattre dans l'Atlantique (XVI° - XVII° siècle).
Chaque semaine, Jubelin invite un ou une authentique spécialiste —comprenez : ni un "toutologue", ni un éditorialiste, ni un politique, ni rien de ce genre— d'une question stratégique ou militaire liée à l'actualité brûlante. En format long, d'une bonne heure et demie en moyenne, il nous aide à comprendre et, souvent, à anticiper les évolutions des conflits du monde, en se centrant sur un sujet thématique ou géopolitique. On trouve par exemple, dans les derniers numéros : "Comment Taïwan se prépare à une invasion chinoise", "Bons baisers de Paris : l'influence russe en France", "L'Iran, le Hamas et Israël", "Les néoconservateurs, de l'influence à la désillusion"…Vous voyez le topo.
Avec son indépendance, Le Collimateur a aussi développé de nouveaux formats : une émission de débat, Le Casque et la Plume s'est récemment ajoutée au flux, ainsi que l'excellent Fil de l'Épée, co-animé avec l'historien André Loez, disséquant les batailles décisives de l'histoire (de la mort de Charles le Téméraire à Okinawa, en passant par la prise des Tuileries le 10 août 1792). Pour se détendre, Le Collimateur reçoit enfin d'autres spécialistes du fait militaire autour d'un film ou d'une série pour en étudier le réalisme, avec un égal panachage en chefs d'œuvre et en navets. Mention spéciale aussi à son format Dans le Bunker, dans lequel une ou un soldat français est invitée ou invité à raconter un souvenir d'opération, pour savoir comment ça se passe sur le terrain, concrètement, quand, pour citer le tout dernier épisode, vous recevez à quelques jours de la relève un message indiquant que l'on a identifié un convoi "suspect" dans le désert du Sahel…
Le Collimateur est toujours informé, toujours pertinent, toujours riche. Il m'est une aide indispensable pour faire la part des choses entre les fantasmes, le bruit médiatique, et ce que l'on peut dire du réel quant aux sujets cruciaux de notre époque ou de notre histoire. Il est vite devenu le compagnon indispensable du café d'après-déjeuner.
8 : The Soundtrack Show

Changement d'ambiance ! The Soundtrack Show est un mensuel consacré à la musique de films. Pas à son histoire, comme le francophone TotalTrax, dont j'avais mentionné l'existence, mais bien à son analyse musicologique.
La méthode de l'animateur, producteur et compositeur David W. Collins, c'est la dissection en format long des bande-sons emblématiques du cinéma populaire. C'est d'étudier comment une œuvre musicale s'y prend pour raconter une histoire. Il n'hésite pas à plonger dans le format long, dédiant sans vergogne 4 épisodes de 45 minutes à une œuvre qui a marqué la discipline (E.T., Retour vers le Futur, Indiana Jones…). Il peut aussi s'attarder sur un compositeur incontournable, comme Max Steiner ou Danny Elfman.
Un peu de connaissance musicologique peut aider à saisir les nuances de son propos… Mais Collins est toujours pédagogue, toujours prompt à rappeler la notion qu'il utilise ici ou là (et les tout premiers épisodes sont entièrement dédiés à nous rappeler ou nous apprendre ce que sont, par exemple, un accord majeur ou mineur, une tierce ou une quinte).
C'est un programme fertile en moments "Eurêka", où l'on comprend soudain pourquoi telles notes ont été choisies par le compositeur, dans tel ordre, en fonction du personnage, de l'histoire ou de la situation qu'il évoque. Pourquoi le thème de Harry Potter évoque si instantanément la magie, ceux d'Indiana Jones et de Star Wars l'héroïsme, mais deux héroïsmes en tous points différents, pourquoi la musique de Star Trek donne envie d'aller explorer les étoiles… ou pourquoi celui de Superman nous donne la sensation de voler.
Parfait pour faire pétiller la tête.
7 : Storiavoce
C'est le podcast d'Histoire et Civilisations, le très beau magazine co-édité par Le Monde et le National Geographic. C'est de l'histoire, pure sucre, pur jus. Animé par des historiennes et des historiens, invitant des spécialistes au micro : aucun risque de tomber sur les imposteurs tant prisés par les plus grandes chaînes de télé et radio.
Chaque épisode porte sur un thème simple, le plus souvent dans la foulée d'un livre récemment paru. Toutes les époques, tous les continents y passent. Rien que sur les derniers épisodes, on trouve par exemple : "L'Amérique espagnole à la veille de l'indépendance", "Être une femme à la Renaissance", "1709. L'année où la Révolution n'a pas éclaté" ou encore "Vieux, un Grec ne peut pas l'être". Comptez là aussi bien 45 minutes, parfois divisées en trois épisodes, par thématique.
Si les invitées et invités sont des spécialistes interviewés sur le champ de recherche en cours, Storiavoce est bien une émission de vulgarisation, destinée au grand public. Avec ce composant indispensable qui est de respecter l’audience et son intelligence : on schématise parfois (en s'en excusant), on ne simplifie jamais —du moins pas au risque de la déformation des faits ou de l'anachronisme. On y fait de l'histoire sociale mais aussi des biographies (mention spéciale à la série de trois épisodes sur l'incroyable parcours des Médicis), on y relate des événements ou des modes de vie, mais aussi des méthodes de gouvernance, comme celles en vigueur lors de la renaissance carolingienne, de la Troisième République ou du Japon médiéval. On y fait l'histoire des idées, mais aussi de l'Okhrana, la Police secrète des Tsars, des fermiers, des gladiateurs, de Venise, des cathares, de Philippe le Bel, d'al-Andalus, de la rue, de la viande, de l'éducation ou du libre-échange.
En bonus, c'est souvent l'occasion de se remémorer que, tout compte fait, nous ne sommes pas si, si mal en France au XXI° siècle (enfin, pour l'instant).
6 : les épisodes spéciaux de Capture Mag

Ah la la, Capture Mag, pour moi, c'est une longue histoire ! Mad Movies, "le magazine du ciné fantastique" est le premier que j'ai commencé à acheter régulièrement, vers mes 16 ans. Depuis, il a changé de main parfois, d'équipe rédactionnelle souvent. Mais les plumes qui ont fait "mon" époque —Stéphane Moïssakis, Julien Dupuy, Rafik Djoumi, Vincent Guignebert— se sont regroupées pour créer l'indépendant Capture Mag et son podcast, Sale Temps pour un Film.
Sale Temps pour un Film n'est jamais que Le Masque et la Plume du cinéma de genre. L'équipe s'y réunit pour donner son avis sur les dernières sorties, ils sont rarement séduits par ce qu'ils voient mais c'est tant mieux : c'est quand ils n'aiment pas qu'ils sont le plus drôles (Souvenir inoubliable, la critique de Charlie, d'après le roman éponyme de Stephen King : "Qui commence ? Julien Dupuy ? — Oui, euh… Ben c'est nul, quoi."
Seulement voilà : ces journalistes experts, qui trempent leurs plumes dans la presse ciné depuis au moins deux décennies et ont interviewé, souvent plusieurs fois et parfois en longueur ses plus grandes et grands représentants, sont tout simplement à compter aux rang des meilleurs connaisseurs mondiaux du sujet. Ils ont donc également développé un format long, avec des séries dédiées aux grands réalisateurs du genre : Cameron, Spielberg, Carpenter, Raimi… Et dernièrement Stanley Kubrick.
C'est d'ailleurs pour cela que j'en parle ici, surtout : parce que Stanley, c'est Stanley. La série qui lui est consacrée est en cours : les trois premiers épisodes (trois heures en moyenne) ont permis d'évoquer l'œuvre du Maître jusqu'à Shining inclus.
Ces séries sont, à chaque fois, un savant mélange de récit biographique et d'anecdotes de tournage permettant de comprendre comment se construit un parcours artistique singulier, et ce qui le caractérise, dans ses thèmes, ses regards mais aussi son cinéma : découpage, montage, construction. Ajoutez-y une obsession de bon aloi pour les infos techniques (format de l'image, distance focale, type de caméra ou de son) et un dosage équivalent en blagues de bon et de mauvais goût, et vous aurez une bonne idée de ce à quoi peut ressembler un épisode spécial de Capture Mag. Une méthode qui fait de nouveau ses preuves pour tout connaître des manies et passions d'un petit photographe new-yorkais, aussi doué pour les échecs que pour le cinéma… qui avait deux ou trois choses à nous dire.
Capture Mag (Et, sur un flux séparé, Sale Temps pour un Film).
5 : Gâchette Gauche
Créé par Erwan Cario, journaliste à Libération et déjà animateur de Silence ! On joue, Gâchette Gauche a le mérite, contrairement aux autres émissions en ligne sur le jeu vidéo, de se consacrer à l'actualité de l'industrie plus qu'à la critique des dernières sorties.
En 2023, et depuis tout de même quelques années, le jeu vidéo est l'industrie mondiale de divertissement par excellence, représentant un chiffre d'affaires nettement supérieur à celui du cinéma, de la musique. C'est aussi un centre névralgique d'innovations, de technologie et de pratiques de divertissement à venir. Ses tendances créatives, mais aussi de management ou de concurrence méritent donc d’être suivies avec attention. D'autant que l'on y bouge vite et qu'avec des acteurs comme Apple, Microsoft, Tencent, Valve mais aussi Meta, Google, Sony ou Netflix, ce ne sont pas exactement des petits acteurs qui se débattent dans le marigot vidéoludique.
Chaque mois, Gâchette Gauche (sur une manette de jeu, c'est celle généralement qui sert à zoomer, voire à ralentir le temps) réunit donc les différents titres de presse jeu vidéo français mais aussi, depuis peu, un ou une journaliste spécialisée issue d'un titre grand public. Mensuelle, l'émission se déroule en deux temps. L'un est consacré à la revue de l'actualité du secteur, l'autre à un débat autour du sujet qui l'agite en ce moment.
À dire vrai, il s'agit d'une émission récente qui, je crois, a besoin de se rôder encore un peu. Les thématiques, notamment, pourraient être parfois mieux préparées, ou plus serrées. Mais, dans les nombreux flux dédiés aux jeux (Canard PC, Origami, ZQSD…), j'ai choisi celui qui me paraît pouvoir parler aussi à celles et ceux qui ne jouent pas, pour peu qu'elles ou ils s'intéressent à l'économie d'un secteur en train d'inventer le monde de demain. Et aussi de célébrer une nouvelle émission : c'est toujours sympa de souhaiter la bienvenue aux nouveaux venus, surtout quand, comme ici, il s'agit en réalité de vétérans et piliers du secteur.
Gâchette Gauche, sur le flux de Silence ! On joue
4 : Some More News

Eh bien voilà ça n'est pas compliqué : c'est comme ça qu'il faut faire. Comme Cody Johnston, Katie Stoll et la chaussette-marionnette Wambo, les présentateurs de Some More News, "la première et la seule émission d'actualité".
Some More News est d'abord une chaîne YouTube. Un show hebdomadaire américain qui, une fois par semaine, s'empare d'un sujet d'actu pour le situer dans son contexte, l'étayer de faits, de données mais aussi de réflexions afin de nous aider à mieux le comprendre, à mieux en saisir les enjeux, et les conséquences probables.
Comme les autres titres déjà cités, SMN n'a pas peur de faire dans le long format : 40 minutes par exemple pour le dernier épisode, qui revient sur Mike Johnson, le nouveau "speaker" de la Chambre des Représentants —l'équivalent aux USA d'un Président de l'Assemblée Nationale. Il y est surnommé "un sacré petit monstre" dès le titre, et l'on comprend rapidement qu'il s'agit plus d'un euphémisme que d'une exagération pour désigner ce fondamentaliste chrétien qui ne dépareillerait pas dans La Servante Écarlate.
Chaque épisode est le fruit d'un intense travail de recherche, qui en assure la solidité. Celle-ci peut d'ailleurs être facilement constatée à mesure que les années passent en confirmant les analyses et prédictions de l'équipe. Cette dernière sait aussi trouver le juste dosage entre information et humour, sans oublier de faire preuve de tact, d'empathie, de compassion… Ou d'indignation. Certains très longs formats, comme ces presque trois heures utilisées pour déboulonner la statue de Jordan Peterson, le gourou américain de la pensée masculiniste, leur donnent l'occasion de briller particulièrement.
Depuis peu, SMN est également diffusé en podcast, accompagné de Even More News, format moins écrit, discussion entre Katie, Cody et un de leurs auteurs ou une de leurs autrices, parfois d'un ou d'une invitée en prime. Cette liberté de ton leur permet d'aborder les autres actualités, celles qui n'ont pas fait l'objet de leur numéro de la semaine. Celles-ci sont presque toujours d'origine américaine… Mais en même temps, une bonne partie de notre avenir dépend de ce que deviendront les États-Unis, ou de ce que nous en importons, dans le champ médiatique, politique et intellectuel. Les suivre de près n'est donc pas inutile.
3 : Our Fake History
Et nous voici sur le podium. À titre personnel, Our Fake History, serait mon numéro 1 de cœur. Pour moi, c'est le podcast parfait. Le ton, le thème, l'écriture, la voix, la diction, l'accent même et, en bonus, la bande-son, également signée du Canadien Sebastian Major, producteur et présentateur, historien à plein-temps et musicien à ses heures perdues.
Our Fake History revient sur les grands mythes de l'histoire pour en démêler le vrai du faux et nous instruire : que s'est-il passé à Salem ? Qui était l'homme qui a inspiré Zorro ? Qu'est-ce qui a tué Mozart ? Les Amazones ont-elles existé ? Le bluesman Robert Johnson a-t-il vraiment vendu son âme au diable ? On en retient une galerie de portraits et un cortège de vision où nous guide Sebastian, équipé de ses armes favorites : la méthode scientifique et le travail des spécialistes.
La forme est aussi, à mon humble avis, parfaite : chaque épisode commence par un récit, une anecdote historique ou parfois un souvenir personnel dont on cherche en vain le lien avec la thématique annoncée en titre, avant que notre hôte attaque en piqué, précis et déterminé comme un oiseau de proie, vers le mythe qui a retenu son attention cette fois-ci. On est aussitôt accroché par son ton à la fois humble et sérieux, et émerveillé par les ressources infinies de l'imagination humaine. Et d!s lors prête, ou prêt, à découvrir, par exemple, qui étaient vraiment Attila, Cortès, ou Nostradamus.
Il faut un peu s'accrocher sur le niveau d'anglais, mais c'est en même temps une excellente occasion de pratiquer. Ça marche donc aussi incroyablement bien pour s'endormir : un épisode pourra vous durer plusieurs soirs, expérience garantie ! Mais c'est un effort intellectuel qui en vaut la peine, non seulement pour apprendre de notre passé, mais aussi pour redécouvrir tout l'émerveillement enfantin dont nous sommes capables : la seule chose en nous pour le salut de laquelle il vaut de prier.
2 : Tech won’t save us

Le titre de ce podcast est tout un programme : "La technologie ne nous sauvera pas". Depuis 200 épisodes maintenant, Paris Marx étudie au microscope le secteur industriel de la haute technologie.
Il s'est rapidement rendu compte qu'en effet, la technologie ne nous sauverait pas. Car comme on le sait, il n'y a rien de foncièrement bénéfique ou néfaste en la matière : tout dépend de l'usage que l'on en fait. Ce qui compte, c'est donc la politique, bien sûr.
Et, par conséquent, l'idéologie. Car c'est là que Tech Won't Save Us devient vraiment puissant : on y découvre comment la Tech est devenue un mouvement politique à part entière… voire religieux. Ce que l'on y met, ce que l'on attend, ce qu'elle promet, ce qu'elle construit : voilà ce qu'il est essentiel de suivre de près, de comprendre, d'analyser, en ce début de siècle un peu hystérique. Peu à peu l'on réalise ainsi que l'industrie de la Tech nourrit elle-même sa propre idéologie, et ses chapelles, pas forcément rassurantes : libertarisme, darwinisme social, individualisme… voilà ce qui habite bien souvent les entrepreneurs de la Tech californienne et leurs suiveurs et admirateurs en Europe comme en Asie. Et non : il ne s'agit pas d'un fantasme, mais bien d'une pensée réfléchie, assumée, écrite et revendiquée, qui a ses livres, ses thèses, ses think tanks, ses héros et son histoire.
C'est là qu'il faudrait agir, c'est là qu'il est urgent d'agir, ou a minima de comprendre pour distinguer, dans la brume, où nous allons.
1 : La Chute

Pour finir, il me paraît indispensable de déroger à la règle que je me suis moi-même imposée : il s'agit d'une chaîne YouTube, pas d'un podcast. Mais elle supporte parfaitement l'écoute de type radio.
Et surtout, elle est vraiment essentielle. Comme s'il s'étaient donné le mot, depuis quelques semaines, j'entends autour de moi des gens s'inquiéter "du retour de Trump". Et chaque fois je me dis : "Ah, c'est qu'ils n'écoutent pas La Chute".
La Chute, c'est un podcast lancé par le journaliste français William Reymond, installé aux USA depuis une grosse décennie. En décembre 2020, il a créé cette chaîne car il tenait à prévenir que Donald Trump était en train de préparer un coup d'État. Il a alors entrepris de le décortiquer semaine après semaine, avec cette question : "assiste-t-on à la chute de la démocratie américaine ?".
William Reymond n'est ni complotiste, ni devin : il est journaliste d'investigation. Et il fait son travail : il enquête et il partage les confrères et les consœurs. Il n'a pas deviné, bien entendu, que les manœuvres de l'homme d'affaires se termineraient par l'assaut du Capitole. Mais il savait, et nous avertissait, qu'il faisait pression sur les différents États pour qu'ils nient le vote et envoient de faux grands électeurs à la cérémonie de nomination de son successeur. Il étudiait les prétendues preuves qu'il présentait devant les tribunaux, et les raisons pour lesquelles elles étaient systématiquement rejetées. Il lisait, sur les réseaux sociaux et les boucles Telegram, les groupuscules néo-nazis pendant qu'ils s'organisaient, à l'invitation de leurs gourous racistes et autoritaires comme Steve Bannon, Michael Flynn ou Roger Stone, qui envisageaient tranquillement le recours à la loi martiale. Il découvrait comment la bande de conjurés mettait au point, avec l'aide de l'avocat John Eastman, les arguties juridiques censés permettre à Mike Pence de détourner la loi pour prolonger le mandat de l'apprenti dictateur. Bref : il enquêtait et, donc, il savait.
Depuis septembre, La Chute est revenue sur YouTube, avec de bien plus fortes ambitions. La question reste la même : assiste-t-on à la chute de la démocratie américaine, ou à celle de Donald Trump, voire du Parti Républicain, largement compromis dans son soutien à celui qui ne peut plus être désigné que comme un aspirant dictateur ?
Désormais, c'est une émission diffusée plusieurs fois par semaine. Les formats s'adaptent avec l'actualité : biographie des personnages-clés, comme Rudy Giuliani, dialogue avec la communauté, décryptage des procès en cours, mise à jour des dernières péripéties judiciaires. C'est passionnant, c'est très clair, c'est pédagogique et, surtout, c'est humain. Familial, même : l'émission est produite à six mains, grâce à l'aide de ses deux fils. Thomas, le réalisateur invisible et Cody, la vingtaine, né aux États-Unis, qui relaie les débats tels qu'ils sont posés par celles et ceux de sa génération.
Les manœuvres de Trump pour mettre un terme à la démocratie dans son pays, et le programme qu'il a promis d'appliquer en cas de réélection, sont bel et bien effrayants. Mais grâce à William Reymond, on se rend compte, quasiment chaque jour, que la même démocratie se défend, pied à pied, contre cette tentative de meurtre constitutionnel. Les tribunaux d'appel, les cours suprêmes, les procureurs et procureures, les élus et les élues ont à leur disposition quantité de preuves, et même d'aveux, dans les divers procès où se débattent Trump et ses avocats : l'affaire de fraude fiscale dans l'État de New York, celle de subversion des élections en Géorgie, celle des documents secrets illégalement emportés depuis la Maison Blanche, celle de la tentative de coup d'État du 6 janvier et, surtout, des manœuvres et collusions qui l'ont préparée et précédée.
Non, pour les États-Unis, tout n'est pas perdu, loin de là.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas matière à s'inquiéter et bien entendu, pas plus que William Reymond, je ne connais l'avenir. Mais j'ai les informations en détail, au quotidien, les plus précises, voire offensives, dans ce combat politique majeur de notre époque. Tout n'est pas perdu, et suivre ce combat dans toute sa rigueur et ses incommensurables efforts, redonne un peu de foi, un peu de prise aussi. Alors n'hésitez pas, vous aussi, à mieux faire connaissance avec La Chute et les soldats de la démocratie américaine.
Prochaine newsletter : samedi 13 janvier.
Gardons les pieds sur Terre pendant que ça tourne.
Un grand merci à Marjorie Risacher pour sa relecture attentive, et ses coquillicides impitoyables.





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