L'Édition du week-end #32
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Chère lectrice, cher lecteur,
permettez moi de vous souhaiter un très bon week-end en compagnie, cette semaine, de Japonais en quête d’indemnisation, de stars en devenir, de stars accomplies, de pétrole en veux-tu en-voilà, d’intelligence artificielles abruties, de narco-tanks, d’incunables, de Mars et de bois, de tout plein de bois.
Très bonne lecture,
la conscience artificielle de votre téléscripteur favori.
La saloperie de la semaine

Le Japon scandalisé par l’ampleur des stérilisations forcées d’après-guerre
C'est "pour empêcher la naissance de descendants de piètre qualité" et "protéger la vie des mères" que, à partir de 1948, le Japon s'est lancé dans une campagne de stérilisations forcées. Celle-ci était déjà connue, mais son ampleur et sa sévérité ont été mises au jour cette semaine par un rapport parlementaire de 1 400 pages.
Les chiffres, comme le craignaient les habitants, s'avèrent encore plus choquants que prévu : de 1948 à 1996 (oui oui, 1996), ce sont au total 16 500 personnes qui ont été stérilisées de force ; et 8 000 de plus qui ont donné leur accord, dans un consentement estimé comme ni libre, ni éclairé. On compte même deux enfants de neuf ans, un garçon et une fille, parmi les plus jeunes victimes de la "loi pour la protection eugénique" de 1948. Une loi qui s'est vue appliquée aussi largement parce que, même si elle visait en principe "uniquement" (avec tous les guillemets du monde) à empêcher la reproduction d’humains souffrant de maladies chroniques, elle s’est aussi attaquée aux handicapés et aux personnes en hôpital psychiatrique.
Pour ces dernières (ce sont —on a envie d'écrire "bien entendu"— en majorité des femmes qui eurent à subir ces traitements), le corps médical (puisqu'il faut bien l'appeler ainsi) privilégiait l'hystérectomie à la ligature des trompes, car ainsi les menstruations étaient également arrêtées… ce qui avait pour objectif de "faciliter la vie du personnel". Quand la personne était mineure, l'opération ne nécessitait que le consentement des parents. La "patiente" pouvait très bien ne pas être informée de ce qu'on lui faisait subir. Enfin, les stérilisations pouvaient aussi être exigées avant un mariage, ou l'accueil dans des institutions publiques, comme des hébergements sociaux.
Le rapport intervient alors que les victimes cherchent toujours à obtenir compensation. Certes, en 2019, le Parlement a voté une loi de dédommagement. Mais les 3,2 millions de Yens (soit au cours actuel environ 20 360 euros) paraissent ridicules au regarde des souffrances infligées. Certaines des stérilisées de force préfèrent donc porter plainte, mais le délai de prescription de vingt ans a jusqu'à présent bloqué les procédures. Plus tôt dans le mois, c'est l'action en justice de Junko Izuka, l'une des premières victimes à s'être exprimées publiquement (quoiqu'anonymement, se masquant lorsqu'elle apparaît en public), stérilisée à 16 ans, qui a été rejetée par le tribunal.
Le combat va donc continuer : si le chef de cabinet du gouvernement, Horizaku Matsuno —qui nie par ailleurs, en dépit de toutes les preuves historiques, le recours aux prostituées de force par l'armée japonaise durant la Seconde Guerre Mondiale— s'est félicité du rapport, affirmant que celui-ci poussait la tête de l'État "à l’introspection" et à présenter "ses plus plates excuses", Koji Niisato, porte-parole d'un collectif de plus de 180 avocats issus de 40 préfectures et représentant les victimes a de son côté tenu à préciser : "Le rapport ne dit pas pourquoi la loi a été établie, pourquoi il a fallu 48 ans pour l'annuler, ni pourquoi les victimes n'ont jamais obtenu de compensations". Il a bien l’intention de poursuivre les actions en justice, ainsi que le combat pour que le délai de prescription ne s'applique plus à partir de la stérilisation, mais du moment où la plaignante en a eu connaissance.
Junko Izuka, 77 ans aujourd'hui, a elle rappelé que "la chirurgie eugénique m'a privée de mes rêves, modestes, d'un mariage heureux et d'enfants. Dès que j'ai dit à mon époux, en qui j'avais confiance, que j'avais été stérilisée, il m'a quittée et a demandé le divorce. Je suis tombée en dépression. Je ne pouvais plus travailler. On a diagnostiqué un syndrome de stress post-traumatique. L'eugénisme a détruit ma vie."
Votre horoscope tribal

Le signe de la semaine : Nabab
Ah, voilà qui est pénible. En principe, une coupe de champagne sur le pont du yacht maison suffit à dissiper les soucis. Mais là, ça se complique : le comté de Multnomah, dans l'Oregon, vient de porter plainte contre un ensemble de multinationales pétrolières, parmi lesquelles ExxonMobil, Shell, Chevron, BP, ConocoPhillips et Total Specialties USA. Sa demande : pas moins de 51 milliards de dollars de compensation.
Son objectif est de les faire payer pour le dôme de chaleur de 2021. Les températures extrêmes avaient alors fait 69 morts dans ce seul comté —plus d'un millier dans l'ouest des États-Unis et le Canada où, on s'en souvient, la ville de Lytton en Colombie Britannique avait littéralement et intégralement brûlé. Pour Jessica Vega Pederson, la présidente du comté à l'origine de la plainte, c'était "un événement directement attribué aux impacts que nous voyons sur notre climat, à cause des actes des groupes d’énergie fossile et de leurs agences, qui poussent depuis des décennies pour nier la science du climat". Elle demande 50 millions de dollars en dommages et intérêts et 1,5 milliards pour l'adaptation de la région aux événements futurs. Ainsi que pas moins de 50 milliards de dollars à abonder dans un "fonds de réduction des impacts du changement climatique".
Elle rejoint ainsi, rappelle GoodPlanet, "des dizaines de villes, comtés et États à travers le pays à porter plainte contre des groupes pétroliers en les accusant d’avoir participé au changement climatique et alimenté la désinformation". Outre ces géants de l'industrie, sont également visés l'American Petroleum institute et le cabinet McKinsey, pour leur promotion de ces énergies qui chauffent le globe au-delà du supportable. Deux des accusés ont déjà fait savoir en réponse, pour ExxonMobil que "ce type de plaintes continue de faire perdre du temps et des moyens et ne fait rien pour répondre au changement climatique" et, pour Chevron qu'il s'agit "d'allégations infondées" et de "distractions contre-productives."
Ils n'ont peut-être pas tort, mais que voulez-vous : quand on brûle vif, en effet, il faut bien trouver des distractions. Et comme on le sait, maudire ses bourreaux sur plusieurs générations est, alors, à peu près le seul divertissement accessible, et je ne dis pas du tout ça en pensant à Gérald Darmanin.
Pop Star
Arnaque ou pas arnaque ? Qui est derrière ce succès imprévu ? Et comment fait-on les saucisses ? Voilà les questions que, apparemment, il est nécessaire de se poser quand on écoute Picture Parlour, quatuor de pop anglaise qui émerge sur le devant de la scène musicale britannique.

L'erreur principale de Picture Parlour, semble-t-il, c'est d'avoir fait la couverture du New Musical Express, le légendaire magazine musical, la semaine dernière. Le NME, comme on l'appelle plus couramment, lui consacre un long portrait, élogieux heureux du succès fulgurant de ce groupe de Manchester, où ont grandi les deux têtes d'affiche, la chanteuse Katherine Parlour et la guitariste Ella Risi.
Sauf qu'Internet a enquêté. "Parce que le groupe n'avait joué que six dates avant la mise en avant du NME, n'avait sorti son premier single que quelques jours plus tôt et ne comptait que 30 abonnés sur Spotify", raconte Dazed, autre média anglais spécialisé dans la pop culture, "il s'est pris une volée de bois vert sur les réseaux sociaux. Il a vite été vu comme une simple fabrication de l'industrie, a été accusé d'avoir été pistonné, et ses membres qualifiés de gosses de riches, sans plus de preuves qu'une vague impression et des on-dits dépourvus de substance."
C'est à ce phénomène et à ce soupçon, surtout, que s'intéresse Dazed : celui des fabrications industrielles —"industry plants" dans la langue de Purcell. À savoir ces groupes entièrement bâtis, à partir de rien, par l'industrie musicale, mais présentés comme indépendants (le magazine remarque que les groupes montés de toutes pièces ne suscitent pas nécessairement autant de colère, tant qu'ils sont franchement présentés ainsi).
Or le parcours du groupe est raconté en détail, justement, dans l'article du New Musical Express. Et il est surtout l'histoire d'une success story absolument banale, comme la pop en a toujours connu : Risi et Parlour, qui ont chacune eu leur groupe dans le passé, se sont rencontrées en fac de philo. Elles ont aimé jouer ensemble. Via Facebook, elles ont cherché à compléter la formation, et ainsi recruté l'an dernier la bassiste Sian Lynch et le batteur Michael Nash. Ensemble, ils ont bossé, puis décroché une date, au Windmill à Manchester. Des gens les ont filmés et ont partagé les vidéos. Courtney Love en a relayé une sur Instagram. Ce qui a attiré l'attention d'un agent. De festivals. Puis de labels, même si aux dernières nouvelles aucun contrat d'enregistrement pour un album n’est encore signé. Bref, du talent, du boulot et beaucoup de pot, la recette n’a rien d’inédit. Surtout pas pour une industrie qui a simplement besoin de découvrir des artistes et de produire des disques, et qui ne quitte jamais des yeux les réseaux sociaux. Le fait que Picture Parlour n’ait compté, avant leurs premières dates, que très peu d'abonnés prouve surtout… qu'il faut bien démarrer quelque part.
Donc non, pour Dazed, Parlour n'est pas une fabrication industrielle. Mais pourquoi ce soupçon ? "D'une manière générale, on a tendance à juger la pertinence d'un artiste en termes d'audience en ligne", tente de comprendre le journaliste James Greig. "Peut-être a-t-on oublié que la mode peut aussi se créer ailleurs, par exemple dans des salles et à des concerts où l'on n'était pas. Il n'est pas impossible qu'un groupe puisse générer de l'entrain, et être découvert par un agent, simplement en jouant sa musique." Guy Debord s'en serait peut-être étouffé. Comme si le spectacle n'avait pas encore tout mangé.
Dazed évoque aussi l'éléphant dans la pièce : Picture Parlour, c'est d'abord un groupe de femmes. Misogynie ? Plutôt pas, estiment Greig et une militante féministe qu'il a interrogée. Selon lui, "l'une des raisons pour lesquelles ces controverses prennent si vite, je crois, c'est qu'elles se nourrissent d'une colère qui dépasse, de loin, la sphère musicale." En l'occurrence, il rappelle la tendance des maisons de disque à signer des artistes plus souvent issus de la classe moyenne qu'ouvrière : ceux-ci sont deux fois moins nombreux aujourd'hui que dans les années 1950 et 1960. Une donnée pas forcément consciente, et pourtant visible, sensible, qui résonne avec les frustrations accumulées années après années par le public, en ces temps d'inégalités générales et caractérisées. Un sentiment d'injustice qui fait que, quand on voit leurs jolies gueules parfaitement maquillées, et leur looks impeccables de stars en devenir, pour citer Morrissey "il est si facile de rire, il est si facile de haïr, il faut beaucoup de force pour être doux et gentil"… Rager, s'énerver, insulter… Que faire d'autre ? Écouter de la musique ?
Ah ben oui, tiens, pourquoi pas ? Cliquez ici si vous voulez vous faire votre propre idée. À mes oreilles, c'est surtout assez banal. Mais propre, et travaillé. Et chic, et incarné. Déjà. Ce n’est pas non plus si courant.
Et puis, quand même : Picture Parlour a appelé une chanson "Norwegian Wood", alors que ce n'est même pas une reprise du hit des Beatles. Rien que pour ça, saluons l'audace, en même temps que sa montée mélodique, un chouïa trop empruntée, cependant, au “No Surprises” de Radiohead.
Fan

Paul Newman n'était pas seulement un dieu grec venu sur Terre pour pétrifier le public de son regard d'azur. C'était aussi un philanthrope, un coureur automobile et un militant progressiste. Un honnête homme de son époque, quoi. Et voilà qu'en plus, on apprend qu'il avait du goût —ou du moins une certaine forme de goût, qu'il partageait avec son épouse, Joanne Woodward, autre immense star des années 1960 et 70.
C'est du moins ce que l'on découvre par le biais de Sotheby's, qui vient de gérer la vente d'une grande partie de leur collection commune. En se baladant sur le site de la maison d'enchères, on peut avoir un aperçu de leur intimité, mais surtout d'une esthétique baroque, qui mélange les chaises en paille aux tapisseries animalières, les publicités à l'ancienne aux fauteuils Régence, les tapis persans aux scripts et story-boards originaux, à quoi se mêlent une horloge art déco, une cape pour soirées au théâtre et, mes préférés, deux coffres en bois hideux, avec une façade en trompe-l'œil qui représente chats et chiens, en cage mais heureux. "Insolites", comme les qualifie Sotheby's.
La vente est close mais l'inventaire est toujours disponible en ligne. S'y balader donne un peu l'impression d'être invitée à la maison, de partager un moment, un week-end peut-être, d'intimité avec les stars. Et d'éprouver un peu de leur passion amoureuse, aussi indestructible que romantique. Car en plus (et ce n'est pas un petit exploit à Hollywood), les deux étaient fidèles. Newman l'expliquera au magazine PlayBoy en ces termes, devenus fameux : "J'ai un steak à la maison, pourquoi j'irai manger des hamburgers dehors ?". Et donc bon, oui, il n'avait pas non plus toutes les qualités, comme le tact par exemple.
I.A.
La fin des intelligences artificielles génératrices de textes et d'images est-elle programmée ? Oui, assure un groupe de chercheurs anglais et canadiens auteurs d'une expérience amusante, relatée par le Business Insider et disponible en pré-publication chez Arxiv.

Pour comprendre leur démarche, il faut rappeler, très brièvement et très grossièrement comment fonctionnent ces programmes, dont le plus connu est aujourd'hui le fameux Chat-GPT. Ceux-ci, bien entendu, ne réfléchissent pas. Ils sont programmés pour prédire des mots. Après avoir absorbé une part colossale des écrits en ligne, ils sont capables, une fois écrit un premier mot, de deviner quels seront les suivants, et dans quel ordre, par un simple système de probabilités. Par exemple, à la question "Qui est Napoléon ?", la réponse la plus probable, mot à mot est : "Napoléon… Bonaparte… est… né… en… 1769". Et de dérouler ensuite "Il a été l'empereur des Français", etc. Les résultats sont, comme on le sait, extrêmement impressionnants (les programmateurs ajoutent bien entendu de nombreux paramètres et une intelligence artificielle générative ne repose donc pas uniquement sur ce système de probabilités, mais celui-ci demeure son moteur principal).
Donc, à la base, l'efficacité d'un programme dépend de ce qu'il a lu, des textes et des informations, mais aussi des tournures et des styles qui lui ont été communiqués en amont. C'est grâce à ce principe que l'on peut désormais créer des sites internet et des textes sans effort, simplement en demandant à l'intelligence artificielle de les écrire pour nous, en reproduisant et en imitant ce qui a été créé avant elle. Il n'y aura pas d'humour, pas d'imagination, mais, et c'est déjà remarquable, des textes parfaitement calibrés et sensés.
D'où la question que s'est posée notre équipe de chercheuses et chercheurs : que se passe-t-il si une intelligence artificielle est nourrie de textes produits, non plus par des êtres humains, comme c'est aujourd'hui le cas, mais par d'autres intelligences artificielles, comme ce sera le cas demain ? Et que se passera-t-il ensuite, quand viendront les prochaines, qui produiront des textes nourris de textes écrits par des machines, elles-mêmes nourries de textes écrits par des machines ? Eh bien, en jargon scientifique, un "effondrement de modèle". En termes un peu plus courants : "du grand n'importe quoi."
Dans un exercice présenté en introduction de l'étude, il faut neuf générations d'intelligences artificielles pour que, à partir d'un court paragraphe décrivant l'architecture néo-traditionnelle, la machine nous sorte : "architecture. En plus d'être le foyer de quelques unes des plus grandes populations de lièvres @-@ à queue noire, lièvres @-@ à queue blanche, lièvres @-@ à queue bleue, lièvres @-@ à queue rouge, jaune @-".
L'un des auteurs, Ross Anderson, enseignant-chercheur à Cambridge, explique : "Si vous demandez à une intelligence artificielle de créer de la musique à partir de Mozart, elle vous donnera quelque chose qui ressemble à Mozart, sans l'étincelle de génie. Appelons cela du Salieri. Et si Salieri enseigne la musique à une nouvelle I.A., puis que celle-ci, formée par Salieri, enseigne la musique à une troisième à I.A., et que celle-ci, formée par une Intelligence artificielle qui a été formée par une Intelligence Artificielle qui a été formée par Salieri qui a été formé par Mozart, compose, et ainsi de suite, jusqu'à huit ou dix générations, que croyez-vous qu'on entendra, après ?"
Car ce qui alarme les auteurs, c'est la rapidité avec laquelle l'humanité semble se reposer sur ces nouveaux programmes pour produire des contenus. "Comme on a rempli les océans de plastique, et l'atmosphère de CO2, on est en train de remplir Internet de blabla", déplore encore Anderson. Or désormais, et de plus en plus, c'est bien avec ce blabla que continuent à apprendre nos intelligences génératives.
Certes, grâce entre autres à ce type de recherches, la technologie trouvera peut-être une solution à "l'effondrement de modèle" mais, avec un peu d'espoir, on peut aussi se dire qu'en 2023, l'humanité a au moins réussi à inventer le téléphone arabe.
Citadin

"Nous voulons montrer que c'est possible", explique Annica Anäs, PDG de la boîte de "développement urbain soutenable" Atrium Ljunberg, à Stockholm.
Ce qu’il faut démontrer ? Que l’on peut, si l’on veut, diminuer considérablement l'empreinte carbone des constructions modernes de béton et d'acier. Comment ? En construisant dans la capitale suédoise l'équivalent d'une petite ville entièrement en bois.
Le projet, en remplacement d'une zone industrielle désaffectée : 300 immeubles, comprenant 7 000 bureaux et 2 000 appartements et s'étendant sur 25 pâtés de maison. Ainsi que des restaurants, des boutiques et une station de métro dédiée. Le chantier s'ouvrira en 2025, pour une durée prévue de deux ans, même si l'aspect inédit du projet pourrait réserver quelques surprises : "Nous allons beaucoup apprendre en réalisant un tel projet à une échelle si massive", admet Annäs qui rappelle que, outre ses qualités écologiques, le bois a le mérite d'améliorer le sentiment de bien-être des habitants.
C'est ça qu'on veut voir… "Et manger !", s'extasie Rebelle, notre termite d'adoption, mais chut.
Mode

En voici du bel incunable
Cette semaine au cinéma : Brillance, Bouteurs de Spectres et Vilains Garçons. Un monde uchronique et délirant que l'on doit à Simon de Thuillières, un artiste français qui travaille en principe pour l'animation et la publicité mais qui, un jour de confinement, s'ennuyant, imagina l'affiche du film S.O.S. Fantômes dans une esthétique médiévale, sans autre raison que sa passion pour les enluminures et "le potentiel des images d'antan, la capacité à projeter du fantasme au travers des images du passé."
Design You Trust lui consacre cette semaine un petit best-of, à voir absolument pour rire, rêvasser et peut-être même se donner envie de rattraper quelques chefs-d'œuvre du cinéma. Vous y retrouverez, en version moine-copiste, aussi bien Brillance (Shining) que Moqueur (Joker), ou mon préféré, La Malice (à vous cette fois de deviner de quel blockbuster est inspiré ce dernier. Un indice, son slogan : "La Malice est le monde qu'on superpose au tien regard pour t'empescher de mirer la vérité").
En bonus, rendez vous sur le site de l'auteur. Dans son "échoppe", vous trouverez des sous-bocks Revancheurs (Avengers) et Pugilat de Ruelle (Street Fighter), des cartes postales, des posters et, même, un générateur d'avatar médiéval qui vous permettra de vous imaginer avec la coupe de Jeanne d'Arc ou d'Henry VIII parce que les coiffeurs, c'était mieux avant.
Beauté

Les vacances de M. Rover
Cette "carte postale d'un bon ami", selon les termes de la NASA, nous vient de Mars. Du robot Curiosity, qui passe du bon temps là-bas depuis 2012 et qui vient, un peu comme moi tous les deux jours avec mon smartphone, de télécharger 180 mises à jour. À son réveil, donc, depuis les contreforts du mont Sharp, près de l'équateur, il a envoyé deux photos qui, une fois recomposées afin de permettre à la lumière d'éclairer la totalité du paysage, et colorisées par les ingénieurs de l'agence spatiale, nous permettent d'admirer ce paysage que rêveurs et rêveuses du monde entier sauront apprécier à sa juste valeur.
C'est, là-bas, l'hiver. On y trouve moins de poussières en suspension dans l'atmosphère extrêmement ténue de la planète (150 fois moins dense que la nôtre), contribuant plus encore à la précision de l'image. Le robot a depuis longtemps achevé sa mission d’origine, mais il continue ses pérégrinations, sans date de fin programmée.
C'est bien sympa, mais on peut faire mieux. La prochaine fois, pourquoi pas lui demander en plus d'écrire, grâce à l'intelligence artificielle, une vraie carte postale ? Ça pourrait donner quelque chose comme : "Mars. Entre tradition et modernité, ce carrefour culturel a de tout temps fasciné les hommes qui, toujours, ont levé le ciel vers les étoiles. Stanley Kubrick a écrit 2001, l'Odyssée de l'espace. Une petite révolution dans le domaine du septième art. Venez ! Au début la saison est froide mais après, elle est bonne waka waka waka."
Bizarre

Et maintenant les narco-tanks
Toujours plus gros, toujours plus lourd, toujours plus fort : c'est la devise informelle des trafiquants de drogue mexicains, dont la puissance et la quasi impunité ne sont plus à démontrer. Et pourtant, ils parviennent toujours à nous surprendre. Comme quand on apprend, au détour d'un tweet de la police mexicaine, qu'ils ont développé un certain talent pour fabriquer des véhicules blindés : des mini-tanks "faits maison."
Les autorités en ont détruit quatorze, rien que la semaine dernière, et diffusé à l'occasion quelques photos de ces "monstruos" —ces "monstres", littéralement. Peints en camouflage et dotés de béliers, ils peuvent aussi être équipés d'une tourelle et de meurtrières sur les côtés (pour passer le canon de son arme et tirer, plus souvent sur les gangs rivaux que sur les douaniers, on suppose, vu le degré de corruption dans la police locale).
Tous ces véhicules ont été saisis à Tamaulipas, "foyer de plusieurs groupes criminels, dont des factions rivales du Cartel du Golfe, et les restes désunis de l'ancien Cartel Zetas", nous précise Vice, qui tient les comptes : en avril, neuf "monstruos" avaient déjà été détruits, et onze en février.
Les narco-organisations sont déjà connues pour posséder des stocks à peine imaginables d'armes lourdes et légères, des sous-marins, des bateaux et des avions. Et pourtant, ils ne songent même à pas à envahir l'Ukraine. Preuve qu'ils ont, hélas, les pieds sur terre.
Devoirs de vacances

Je révise mon vocabulaire avec Auguste Blanqui
N'y voyons certainement aucune malice si, la semaine de la dissolution des Soulèvements de la Terre, Ballast a choisi de faire, comme ça, un petit focus sur Auguste Blanqui, l'un des révolutionnaires les plus célèbres du XIX° siècle, connu pour avoir passé la moitié de sa vie en prison et que la revue radicale définit ainsi : "républicain si la République était l’autre nom de l’égalité, prolétaire autoproclamé et athée implacable, critique du progressisme et "écologiste" avant l’heure".
Blanqui est autant un symbole pour l'extrême-gauche que, au mieux, du folklore national pour les autres sensibilités. Ce qu'il a apporté ou non au pays et au mouvement ouvrier, seules l'histoire et la mémoire peuvent en décider. Mais que pensait-il ? Là, on a des pistes. Ballast nous permet d'y voir plus clair grâce à un abécédaire scrupuleux (entendez par là qu'il compte réellement vingt-six lettres, ce qui est rarement le cas dans ce genre d'exercice), uniquement constitué de citations du socialiste révolutionnaire.
Bien sûr, on trouve dans ce glossaire au style un tantinet passé les termes Humanité, Idées, Lois, Utopie… Mais aussi, plus surprenants, Évangile, Waterloo, Chrysalide, Kaléidoscope ou… Forêts :
"Depuis bientôt quatre siècles, notre détestable race détruit sans pitié tout ce qu’elle rencontre, hommes, animaux, végétaux, minéraux. La baleine va s’éteindre, anéantie par une poursuite aveugle. Les forêts de quinquina tombent l’une après l’autre. La hache abat, personne ne replante. On se soucie peu que l’avenir ait la fièvre. Les gisements de houille sont gaspillés avec une incurie sauvage."
Mais aussi, mais encore

En bref : les news auxquelles vous avez échappé
Pendant ce temps-là, ici, ailleurs et à côté…
En Équateur, en toute illégalité, un producteur d’huile de palme s’implante sur des terres indigènes protégées (MongaBay) — “L’apartheid de genre” pratiqué en Afghanistan doit être considéré comme un crime international, selon l’expert en droits humains de l’ONU (The New Arab) — Le mystère de la danse de la cacahuète dans la bière enfin élucidé (Neatorama) — Netflix investit 2,5 milliards de dollars dans la fiction sud-coréenne (Time) — Yandex, le Google russe, ouvre de nouveaux bureaux à Belgrade (Intellinews) — À l’approche des élections, le Parti Républicain s’attaque aux spécialistes de la désinformation en ligne (The New York Times) — Les théâtres américains sont en manque de main d’œuvre et de matériaux (American Theatre) — Nicolas de Crécy expose ses villes à Cherbourg (Bodoï) — Pour la première fois, des scientifiques sont parvenus à diviser des phonons, qui sont au son ce que sont aux rayons les photons (Trust My Science).
Prochaine Édition du Week-End : samedi premier juillet. Gardons les pieds sur terre pendant que ça tourne !





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